4 Avril 2018
Le colloque organisé à Amiens du 15 au 17 mars 1968 sous l’égide de l’AEERS (Association d’étude pour l’expansion de la recherche) proposait un programme de réformes pédagogiques inspirées par de nombreuses idées de l’Éducation nouvelle. Il fut précédé par un colloque à Caen organisé par la même association en 1966.
Le colloque d’Amiens fut salué par un message de Pierre Mendès France. Quant à Élise Freinet, elle envoya un télégramme d’encouragement et rédigea cet article peu de temps après. Il ne fut publié qu’en juin 1968.
Et après Amiens ?
Ces réflexions faites immédiatement après le colloque d’Amiens, bien qu’elles ne soient pas dépassées par leur contenu, appellent, après les événements du Quartier Latin, un engagement d'action immédiate.
Nous voici en présence du fait historique qui brusquement fait éclater les points aigus des contradictions de toute une société. Tout le système de l’Enseignement parviendra- t-il à préserver son unité dans ses propres domaines ? Professeurs et étudiants victimes des mêmes abus face aux prérogatives attardées d’une Éducation nationale dépassée vont-ils faire de l'éducation la grande affaire de toute une nation ?
Conscients plus que jamais de nos responsabilités à notre niveau, dans notre secteur, avec notre longue expérience, forts de la maturité de nos éducateurs, nous allons, de façon nette et précise, offrir notre aide, faire nos propositions et plus que jamais, nous nous sentirons mobilisés pour une cause qui est la nôtre depuis quarante-six ans !
Les colloques de Caen et d'Amiens peuvent être comptés comme les événements les plus importants de l'enseignement depuis la mise en place de la laïcité : par la reconsidération générale du contenu et de la forme de toute la réalité scolaire dans les trois degrés, ils témoignent d'un esprit ouvert et font prévoir des perspectives nouvelles à la fonction éducative à laquelle est associée une ample action de masse susceptible de mobiliser la nation tout entière.
Ils pourraient être considérés comme un événement historique — une sorte de nuit du 4 août — si l’action devait suivre la théorie idéale et nous mettre à pied d'œuvre d'une rénovation urgente de l'enseignement. Mais, il y a loin du rêve à la réalité. On sait hélas ! ce qu'il advint des principes généreux et humanistes des grands laïcs. Ce qu'il advint des rêves idylliques de l'école publique, abandonnée en fait à vivre des misères et des limitations d'une classe sociale maintenue en état de servitude plus ou moins consciente par une bourgeoisie faussement libérale et toujours experte en promesses démagogiques. Educateurs du peuple, nous savons, nous, où nous en sommes.
Après un demi-siècle de travail et de combats au sein de cette école du peuple qui fut et reste notre chantier, nous sommes bien placés pour juger de la question et prévoir l'effort courageux et patient qui nous incombe face au présent et à l'avenir. Mais déjà, nous pouvons dire avec l'autorité de ceux qui ont mis la main à la pâte et créé du pratique et du neuf : nous ferons l’impossible pour préserver de toute dégradation ce que nous avons conquis. Nous redoublerons d'activités militantes pour gagner, à la cause d'une éducation rénovée, la grande masse des enseignants. Nous ne séparerons pas l’école publique du vaste complexe des revendications de la classe des travailleurs et plus que jamais dans l'école et hors de l’école, nous militerons avec le sens total de nos responsabilités pédagogiques, syndicales, politiques, chacun selon son idéologie, dans le milieu qui est le sien. Nous sommes passés à l'action, que d’autres nous imitent et les problèmes avanceront.
Il est rassurant de constater que les responsables les plus lucides du colloque d'Amiens sont conscients de cette nécessité des actes immédiats. C'est avec l’accent d'une irrémédiable décision que Robert Mallet a, en effet, proclamé l'urgence d’une reconsidération totale de renseignement et qui ne peut être totale que si elle est suivie d’action : « Cette quête collective des meilleures formules d’épanouissement de l'homme en marche n’ira pas, au nom de l'irrespect nécessaire des idées usées, sans une certaine violence, sans une façon de bousculer un peu les quilles et les joueurs assoupis. Nous ne devons pas être timorés, ou alors, nous ne devrions pas être là... ».
Il est à craindre, cependant, que cette virile décision ne soit pas facile à appliquer. Même dans le domaine exclusif des idées, dans les joutes habituelles à ceux qui ont profession de penser, à l’écart de toute fonction praticienne. Il semble qu'après quelque vingt siècles, les clercs ne se soient point encore désenvoûtés de l’enseignement de Platon faisant des idées l’archétype des choses sensibles et réelles. Et ils continuent à se persuader — malgré l'évidence cruelle des faits — que la connaissance se divise en deux parties d’inégale valeur : « la supérieure qui est science et l'inférieure qui est opinion. » Ce qui n'est qu’une façon commode de séparer toujours les Maîtres du vulgaire. Il semble même que l’héritage de Platon s'en aille, aujourd’hui, beaucoup plus loin encore, jusqu’à annexer à la fonction professorale ces philodoxes magiciens des apparences et qui s’entendent, comme d’inégalables prestidigitateurs, à prodiguer l'art des mirages. Repensant le colloque d’Amiens qui s’est tenu, si haut, au-dessus de nos têtes, notre inquiétude serait que les philodoxes modernes se taillent la meilleure part dans une réorganisation de renseignement qui ne nous offrirait qu'une vaste leçon de vocabulaire adaptée par les mots, seulement, à des mirages se dérobant sans fin aux yeux des assoiffés qui ne savent plus attendre.
Mais ce à quoi il fallait s'attendre et que prévoyait le simple bon sens, se produit tout à coup : ceux qui ont soif veulent boire et se ruent à l'assaut des fontaines, bousculant tout sur leur passage pour occuper hélas ! les sources taries qui ne peuvent désaltérer et satisfaire les exigences de la vie. Ce ne sont pas forcément ceux qui ont le plus soif qui ont toujours raison, mais leurs actes sont parfois comme une traînée de poudre qui fait éclater au grand jour les feux qui depuis longtemps couvaient. Sans dramatiser la situation pénible des universités que menacent les conflits ouverts de l’actualité estudiantine, on peut affirmer que l’efficacité n’y retrouvera pas de sitôt ses assises.
Ce sont là, semble-t-il, des faits essentiels auxquels le colloque d’Amiens aurait dû donner priorité. Tout d’abord, il aurait été urgent d'accueillir, au sein de l’assemblée délibérante, des délégations de cette jeunesse turbulente qui n’a d'autres recours pour se faire entendre que de porter la bagarre dans des secteurs qui sont les siens. Alors que l’immense troupeau des écoliers du primaire se résigne encore, en apparence, à un abrutissement scolastique qui le fait à peine ruer dans les brancards, la jeunesse a mûri ses hommes à l'épreuve d'une longue, trop longue et trop inhumaine scolarité. Elle en a fait des militants conscients de leurs responsabilités sociales et intellectuelles. C’est un argument sans portée réelle que celui qui tente de dissocier les minorités agissantes de toute la niasse des étudiants en apparence conformistes. En réalité toute cette masse subit les mêmes erreurs et c'est pourquoi elle est sensibilisée à l'action de ses avant-gardes. On s’aperçoit tardivement qu'il faut instaurer le dialogue entre professeurs et élèves ; mais il serait plus urgent encore de l'instaurer entre élèves et responsables administratifs de l'Université, y compris le Ministre de l'Éducation nationale. Il aurait été urgent aussi que le colloque d’Amiens entende ceux-là mêmes dont on allait parler et décider de l’avenir. Ainsi aurait pu s'instaurer un certain climat de détente unissant professeurs et élèves dans une même action orientée par le procès de l'Université actuelle puisqu’aussi bien c'était là le sujet de ces assises. Y avait-il meilleure plateforme d’entente?
C'était rompre du coup avec les habitudes universitaires ; reconnaître ouvertement, humainement, le bien-fondé des revendications de la jeunesse qui déjà valorise l’homme. Elle aurait dit, cette jeunesse, son allergie définitive à des méthodes d'enseignement et, sans doute, proposé des occasions de rencontres humaines, dans lesquelles l’opposition serait apparue comme mouvement de la pensée et non comme raison de lutte.
Ces possibilités d'échanges réels auraient certainement permis de remonter aux sources du mal et tout spécialement à cette enfance où s'est pris le mauvais départ. II fallait pour cela que les enseignants du premier degré aient une place plus généreusement concédée à Amiens, Ils auraient pu alors éclairer bien des lanternes : dire avec simplicité et dans un dépouillement nécessaire, comment les choses débutent mal dans les contretemps de la complexité et des contradictions des milieux scolaire, familial, social. Comment se préparent, jour après jour, erreur après erreur, l'âme des révoltés et celle des résignés qui ne retrouveront jamais leurs chances d’épanouissement et de bonheur. Ils auraient pu parler surtout de leur expérience pragmatique, affirmer à l’aide de documents les bienfaits d’une pédagogie dynamique, riche d’une technique qui dès à présent peut entrer en ligne d'action et se généraliser. Ils auraient dit comment, par leurs propres moyens, ils se sont engagés, depuis toujours, dans des stages de formation des maîtres et comment en France et dans le monde se fait en permanence l'apprentissage du métier d’enseigner dans le premier degré et aussi dans le second degré qui déjà a ses chantiers valables.
Mais, sûrs de leur pratique pédagogique, nos instituteurs auraient dit aussi leur défiance d’une hiérarchie exclusivement axée sur la somme du savoir, leur refus d'une théorie venue de sommités qui, ignorant tout de la base, entendent continuer à enseigner cette base après avoir imposé à nos maîtres deux ans supplémentaires de bachotage pour lui donner une allure plus secondarisée. C'est en effet une sorte d’inconscience — qui nous apparaît comme un scandale — de dénoncer d'une part les dangers du bachotage et de le rétablir d'autre part en lui donnant le pas sur la pratique pédagogique dont on ne se soucie pas le moins du monde. Mais nous reviendrons sur ces graves contradictions fondamentales.
Si nos camarades praticiens, éclairés de leurs propres problèmes, avaient pu prendre contact avec les professeurs du secondaire et surtout du supérieur, ils ne se seraient d'ailleurs pas contentés de proposer et de claironner plus ou moins leurs réussites. Ils seraient allés à Amiens pour une sorte de quête culturelle, en essayant d’y trouver occasion de se jeter dans le péril des confrontations d'idées : celles qui sont nourries des épreuves du travail intelligent et celles qui ne consentent qu’à s'enfiler comme des perles dans les espaces de l’abstraction sans limite. Car nos praticiens savent qu'aucune pensée n'est gratuite ; qu'elle est nourrie de matière et de consistance, sans cesse mises à l'épreuve et repensées sous l'effet d'une logique qui ne serait pas logique pure mais dont ils n'ont découvert que des aspects, des détails à parfaire. Peut-être des prises de contact auraient pu être le point de départ de collaboration par équipes d'éducateurs des trois degrés et par ces équipes ils auraient pu trouver occasion de sortir de leur ghetto primaire, comme les professeurs auraient pu sortir à leur tour du ghetto universitaire. Car il y a aussi, plus brillant certes, plus envoûtant par la voix des sirènes qui en chantent les mérites, mais plus autoritaire et dogmatique, il y a aussi un ghetto universitaire. C'est celui-là même que met en accusation la jeunesse par les arguments sommaires de l'action directe.
En dépit de toutes les contradictions qui depuis des siècles battent ses murs, l'Université est restée la citadelle du Savoir. On y thésaurise les connaissances qui ne sont dédouanées que par diplômes et autorisées à reprendre le circuit sous l'autorité du prestige des Maîtres : ceux du passé qui peuvent toutefois être remis en cause ; ceux du présent qui ne sauraient se discuter. Comme dans toute banque, on y vit dans une sorte de crainte d'une dévaluation des valeurs. C'est pourquoi, près de ces coffres-forts du savoir, une divinité monte la garde : la Science, garantie éternelle du label de culture. Toutes ces réalités s’installent, en toute bonne foi, dans un climat de sécurité intellectuelle et de grande valeur humaine, fait de probité spirituelle, de labeur silencieux au-dessus des inconvénients. Si haut, sans fenêtres sur la vie toute simple de la rue, on ignore tout ce qui se passe au-dessous, si absorbé que l'on oublie de fermer le livre et d'enlever ses lunettes. La science a ses servants et ses martyrs.
Mais de quelle science s'agit-il?
D’en bas, l'on se demande : la science est-elle vraiment une raison de discrimination?
Dans une conférence d'information à un vaste public non sélectionné, Oppenheimer affirmait en 1958 :
« La science ne représente plus, de nos jours, un enrichissement de culture générale. Elle devient la propriété de petites communautés hautement spécialisées qui la vénèrent, qui voudraient la partager, l'expliquer, mais elle échappe à la compréhension universelle... La science d’aujourd'hui a deux caractères essentiels : elle est en grande partie neuve et non assimilée et elle ne fait pas partie du patrimoine culturel commun... Mais la science offre cependant certains aspects qui la relient à toutes les autres activités humaines : elle repose sur une longue expérience accumulée, le présent étant construit sur le passé et le futur sur le présent... elle comporte cet amas d’erreurs, de surprises, d'inventions, d’incompréhensions qui, pris dans son ensemble, constitue une discipline. »
En réalité, c'est à cette discipline que l'universitaire reste attaché. Même si elle est désuète, elle fait partie d'un comportement intellectuel qui est typique de la mentalité du professeur : elle est une technique de vie. La discipline a d’ailleurs, dans le ghetto universitaire, des acceptions variées qui la rendent indétrônable : elle est matière à enseigner dans des perspectives assignées, système et méthode d’enseignement sous les hauts auspices de l'abstraction, elle est surtout influence directe d'un Maître devenu Maître à penser à l'intérieur de la citadelle et c’est l'autorité de son enseignement qui délivre les diplômes. Avec énergie, le colloque de Caen avait dénoncé l'omnipotente autorité du Patron dans les diverses disciplines et les lois du favoritisme qui inévitablement en découlent : plus on a de l'autorité, plus on se doit de prodiguer une science hermétique pour laquelle il faut une initiation tout comme pour une kabbale.
Et cela se fait sous le seul souci d'une expérience personnelle pour laquelle toute initiative est valable sans égards à une collaboration possible. Ainsi Sartre enfermé plus que tout autre dans le ghetto de sa propre pensée philosophique incompréhensible à ses pairs, à l'intérieur de l'Université.
Mais, sorti de la Bastille et s'emparant avec fougue et passion des grands lieux communs, qui de tous temps, ont nourri l'expérience des peuples opprimés, il a su par son militantisme politique, par son œuvre théâtrale, par ses écrits sociaux, appeler à lui l'audience du monde. Il fallait simplement sortir des lieux où se codifie abusivement le savoir, gagner le grand large où palpite la vie qui souffre et qui chante et éternellement redit le prodige du pouvoir des hommes, source inaltérable de l'éducation éternelle.
II n'y a pas de science souveraine et taboue, valeur suprême du génie humain, mais il est des sciences relatives s'appuyant sur les évidences matérielles et qui, par leurs techniques facilement généralisées, simplifient la vie des hommes, leur donnent le sens du savoir et celui de l'ignorance. Ce sont, dit Freinet « des sciences de paliers » :
« Le travail sur le palier est par excellence la zone particulièrement affectionnée des professeurs de tous grades. »
Ils y démontrent jusqu'à épuisement de toute recherche la science des seaux d'eau, pendant que la rivière roule ses vagues vives et que dans son courant une science de l'eau plus complexe et plus dynamique participe au vaste équilibre de la nature. La science de palier n'est donc que momentanée et révisible et ne saurait justifier les prérogatives du philodoxe plein de commisération pour les praticiens primaires, que de son second étage, il regarde « tourner en rond sur leur empirisme »...
Cependant, les choses allant vers le bon sens par les effets de l'expérience bien conduite, inévitablement l'empirisme se dépasse par paliers aussi, jusqu'à découvrir sur le tas une théorie valable qui dès l'instant qu'elle est née et qu'elle amplifie l'expérience a toute la sécurité des processus scientifiques, Avec le secours d'une bonne bibliothèque dispensant à souhait et bon escient la pensée des Maîtres inventeurs, le praticien peut, à son tour, faire œuvre scientifique de palier et par une vulgarisation qui en est la conséquence, rendre ainsi quelques services aux hommes. C’est pourquoi, rassuré par son ouvrage, le praticien- créateur n'a aucune pitié du scientiste qui ne fait que discourir sur sa science de palier avec le seul secours d'une grandiloquence déplacée et inopérante.
Il faut admettre, pour une bonne fois, qu'il y a aussi une expérience et une recherche des problèmes humains étrangères à la science des Maîtres et qui sont susceptibles d'éclairer, d'une lumière favorable, le mystère humain et d'instaurer un certain ordre dans le chaos : c'est là la fonction même de l'éducation.
Il faut surtout admettre, et plus encore exiger, que les contradictions inhérentes à tout le système de l'enseignement soient projetées en pleine lumière. De façon qu'en soit facilité le travail de démolition inévitable. Pour que de cette table rase surgissent, dans toute leur netteté, les îlots salutaires où la rénovation pédagogique a amarré ses pratiques sûres et facilement vulgarisées, c’est-à-dire mises à la portée du vulgaire, de la grande masse, sans risques de dégradation.
Il faut que cesse ce divorce, entretenu par les scientistes qui ne savent sur quelle branche se percher, entre praticiens-tâcherons et théoriciens-lumière, ceux-ci se faisant une vertu de leur ignorance de la pratique. C’est sur le tas, sur le même chantier, sur le même palier que praticiens et théoriciens doivent œuvrer ensemble pour construire la même pédagogie, celle qui manque justement à tous les niveaux et dont l'absence rendra toute rénovation inopérante.
« La vraie fraternité est celle du travail »[1], C'est dans les mêmes difficultés des vrais problèmes que pose la vie que nous éviterons les dangers de la' pratique aveugle et ceux d'une science à courte vue « qui ayant imparfaitement mesuré ses efforts, prend des palliatifs dangereux pour des solutions définitives » et ne s’aperçoit pas qu’elle fait se continuer ce qu'elle voulait détruire.
Ce n’est donc que dans une collaboration loyale et profonde, vers l'unification de la fonction enseignante si souvent proclamée à Amiens, que du bas au haut de l'échelle nous pourrons dénoncer les causes réelles de ce qu'un universitaire[2] a appelé avec raison « la faillite de l'enseignement ». Les causes réelles de cette faillite nous les trouverons les unes et les autres dans les structures mêmes de l'Éducation nationale, dans les prérogatives désuètes d'une administration grégaire et abusivement hiérarchisée, dans les ignorances des Ministres transitoires et interchangeables au gré de la politique du moment. Nous ne voulons pas présager de l'avenir.
Dans une totale loyauté de pensée et d'action nous redisons, une fois de plus, à la suite de Freinet, que nous voulons apporter notre pierre à la construction du nouvel édifice. Nous sommes persuadés que cette pierre sera pierre d'angle de ce rez-de-chaussée qui est notre domaine. Mais nous redisons que cette aide désintéressée et totale nous ne la donnons que dans l’exercice d’une totale liberté d'action et avec le label de la pédagogie Freinet, Nous avons la certitude que le premier degré a une part décisive dans le grand complexe d'éducation à instaurer. Nous sommes persuadés que nos créations, nos découvertes, nos combats et nos victoires peuvent servir la grande cause du peuple dont nous sommes les instructeurs immédiats.
C'est dans cette optique que nous allons proposer notre plate-forme d'action immédiate pour que démarre, à la base, dès aujourd’hui, la Rénovation intégrale de l'Enseignement.
Élise FREINET, L’Éducateur n° 9-10, juin 1968