24 Avril 2019
Les vacances de printemps sont en cours, la troisième zone a démarré cette semaine. La première est rentrée, ses enfants auront 11 semaines de cours avant les vacances d'été... une belle longueur. Pour la dernière, il en restera quand même 9...
Pourquoi cette situation ?
Pour le bien-être des enfants ? Non sans hésitation, c'est tout simplement pour satisfaire l'économie du tourisme blanc.
Sans complexe, les reportages montrent des professionnels des sports d'hiver radieux, car tout est réservé, tout est rempli : des hébergements, aux restaurants en passant par les pistes et les différents espaces de divertissements. De la trottinette des neiges, au traîneau en passant par les raquettes, tout peut se louer ou s'acheter...
Pourtant, ils ne sont pas si nombreux à partir à la montagne
Seulement 8 % des Français partent à la neige et… tous les deux ans (même si une majorité d'entre eux partent au moins une fois par an, voire à chaque période de vacances). Et sur ces 8 %, seulement 9 % des ouvriers partent en vacances l'hiver. Il faut dire qu’une semaine aux sports d’hiver pour une famille équivaut au minimum à trois mois de SMIC. Ce sont surtout les cadres (40 %), les hauts revenus (31 %), les diplômés du supérieur (33 %) qui partent en vacances à cette période, mais moins de la moitié vont à la montagne.
Pas d'inquiétude pour les acteurs du tourisme blanc, les personnes qui partent au ski ne sont pas concernées par les fermetures d’entreprise, les licenciements, le chômage… elles ont le moral et l’envie de consommer avec des budgets suffisants pour faire vivre largement les stations qui ainsi, font le plein de locations et d’activités !
Un calendrier scolaire complice
Et pour être sûr que ces 8 % de citoyens privilégiés trouvent de la neige pendant leur séjour, on organise les vacances scolaires en fonction des périodes d’enneigement.
Les semaines de vacances d’hiver s’étalent sur trois zones, une assurance de continuité pour les professionnels, chaque samedi de nouveaux arrivants. Pas de temps morts !
Pour que ces vacances d’hiver se situent pendant la période la plus enneigée, facile, il suffit de les placer en février voire début mars maxi ! Tant pis pour la rupture du rythme d’apprentissage subie par les enfants. Ceux de la première zone se sont retrouvés en vacances cinq semaines après celles de Noël, à peine le temps de reprendre les habitudes scolaires. Seule la troisième zone profite de sept semaines d'école avant de s'arrêter.
Des solutions ?
On pourrait supprimer une zone et reculer ainsi d'une semaine les vacances d'hiver : les stations s'adapteront, elles construiront, elles savent le faire... et sans scrupules.
On pourrait reculer les vacances de printemps : avec le réchauffement climatique en vue, ce serait peut-être le moyen d'anticiper, de s'adapter, de prévoir d'autres activités et d'autres lieux de séjour.
On pourrait mener une réflexion globale sur le temps scolaire, le temps de l'enfant... mais là, c'est pour l'instant impensable, tant d'intérêts particuliers divergents.
Sur les 8 % de personnes qui vont à la neige, combien d’enfants ?
Pour 3 ou 4 enfants par classe qui partent skier (à part peut-être dans certaines écoles de quartiers privilégiés), plus de 20 enfants subissent cette rupture de rythme. Et bien sûr, ce sont toujours ceux qui vivent le plus d’inégalités qui en souffrent. Pour les autres, pas de soucis, les activités et les sorties culturelles compenseront ! Pendant ce temps de découverte sportive et parfois culturelle de cette minorité d’enfants, des millions d’autres rejoignent les accueils collectifs municipaux – quand leur accès est possible –, sont devant des écrans (télés, ordinateurs, tablettes) ou tout simplement jouent au bas de leur immeuble.
Et les classes de neige qui permettaient à un grand nombre d'enfants de partir skier quel que soit leur milieu social ont été abandonnées... il y a déjà un certain temps.
L’intérêt de l’enfant ne pèse pas grand-chose face à l’intérêt économique du tourisme blanc !